TRACES DE VIE…
C'est un post un peu dur mais très important pour mon journal et pour moi. Ceux qui me connaissent, ceux qui me lisent depuis le début, savent la cicatrice que je porte. Alors vous ne serez pas surpris de savoir que j'ai suivi avec attention l'affaire Courjault. Cette affaire m'a particulièrement touchée lorsqu'elle a éclaté. Période de vie pleine de doutes, de questions, de culpabilité. Et puis, l'histoire avec le père de ma fille était au pire moment de monstruosité.
Oui même si je suis cette femme qui s'assume, peut être certains seront choqués de lire ce post, mais tant pis!
Oui je suis bouleversée par cette histoire. Me dire, me qualifier comme cette femme, même si les tenants et surtout les aboutissements ont été différents pour moi et pour nous, et heureusement! Quand cette affaire a éclaté, je me suis comparée à elle! Je sais aujourd'hui que c'est une erreur, que c'est faux! Ma décision a été toute autre, toute aussi monstrueuse peut être mais la meilleure condition qui soit à l'époque. Bien sûr que ma psy m'a aidée à comprendre, à trouver certaines réponses. Oui je suis cette femme de 34 ans qui a souffert, qui profite de la vie, qui a touché le fond et qui sait que trop bien aujourd'hui que la vie peut être difficile et destructrice. Oui je suis cette femme, qui assume ces choix quelqu'ils soient, et qui assume son passé et les jugements.
Alors en suivant cette affaire, j'ai aussi lu les commentaires qui ont été faits. Et je suis touchée par ces derniers. Même si ils ne me sont pas destinés, je sais combien le regard sur le déni de grossesse est dur à endurer, à vivre! Le jugement est tellement facile.
Mais en lisant le verdict, je me trouve détachée émotionnellement. J'ai grandi! J'ai avancé! Ma cicatrice est là, présente, chaque jour qui passe. Comment cela se manifeste-t-il? Tellement de choses! Un regard de petite fille, un rire, un sourire... Tout me ramène à elle! Tout me ramène à mon geste, à mon choix. Parfois j'ai peur, parfois je souffre en silence, souvent elle me manque! Je m'interdis les maternités, suis mal à l'aise avec les femmes enceintes, suis incapable d'être en présence d'un nouveau né, ne supporte pas les pleurs. Mais je sais que tout çà va passer. Oui tout çà va s'estomper, sans que l'oubli se fasse.
Mon acte a été le résultat de la peur, de non-dits, d'angoisses. Je le sais! Aujourd'hui je vis, je sais que je n'aurai jamais d'enfant, plus jamais! Une fois je n'ai pas senti la vie en moi, et j'ai si peur que cela recommence une nouvelle fois, que je suis la plus prudente qui soit. Un jour de retard est c'est la panique à bord! Et je sais que je ne serai jamais prête à revivre la maternité. Pour des milliers de personnes c'est la plus belle chose qui soit, mais pour moi c'est la pire des éventualités!
Je sais que ce que je dis peut choquer mais c'est moi, moi au profond de mon être!
Alors 8 ans, cela me fait sourire jaune pour trois infanticides! Il y a quelques années, je me serai dit "mais qui suis-je pour juger?" aujourd'hui, je peux me permettre de juger et j'en ai la légitimité! Pourquoi? Parce que cette affaire a fait que de nombreuses femmes comme moi en ont souffert, se sont cachées et ont subi les foudres de l'opinion publique! Oui le déni de grossesse existe, mais heureusement que nous ne prenons pas toutes cette solution définitive. Alors oui, je suis d'accord avec certains psy, ce n'est pas de la prison qu'il lui faut, c'est un suivi psychiatrique. Dans un an, elle sera au sein de sa famille. Et elle pourra recommencer si elle n'est pas aidée! Je ne dis pas qu'elle en a conscience, juste que c'est un mode de fonctionnement psychologique!
Alors ce post au milieu des autres peut choquer mais c'est moi, ma vie, avec ces ombres et ces rires. Chaque jour qui passe même si je joue, même si je suis cette femme libérée et libre, je n'oublie pas ce bout de moi. Aujourd'hui j'en parle avec appréhension mais sans honte, aujourd'hui j'assume ce passage de ma vie, et aujourd'hui j'ose dire ma fille! Même si elle ne le sera jamais... Mais je l'ai démysthiphiée, et puis en parler c'est accepter mon geste et me dire qu'effectivement... Elle vit!
Je suis un peu morose ce soir... Un peu bouleversée, mais avant de digérer tout ce que je viens de voir, je voulais écrire à chaud... Peut être que ce dont je vais parler maintenant va en choquer certains, soit par ce que je vais aborder et narrer, soit par le paradoxe avec les anciens articles publiés, mais il s'agit de moi... Oui de moi, dans mon ensemble et dans toute ma complexité!
Ce soir vient de s'achever une émission sur France 3 sur le déni de grossesse. Pourquoi je vous en parle? Parce que c'est un peu de moi dont il s'agit... Peut être certains l'auront compris suite au premier article publié dans ma cicatrice. Mais je suis passée par cette phase sombre et inhumaine pour certains. Seulement cela ne s'est pas très bien fini pour moi! et pour ceux qui m'entourent!
Encore aujourd'hui, malgré en avoir parlé, malgré une psychothérapie, je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas comment... J'ai quelques réponses mais pas les plus importantes à mes yeux. Je suis toujours en quête de ce saint grâle qui m'aiderait à accepter mon geste, bien que je me dis que si je ne le trouve pas c'est que je ne veux pas comprendre non plus, au fond de moi! Il y a cinq ans, je me suis rendue compte que j'étais enceinte au bout du sixième mois. Enfin c'est l'estimation que j'ai faite. J'ai senti un léger mouvement en moi et j'ai paniqué. Je n'avais pas vu mon corps changé, pas senti le moindre symptôme, pas le moindre changement ou la moindre nausée. Mon couple était bancal, mais n'avait jamais été stable d'un autre côté. Mon compagnon à l'époque était solitaire, peu engagé sur du long terme avec moi... On attendait de trouver la bonne personne en évitant de rester seuls chacun de notre côté; de plus je connaissais les colères qui pouvaient le submerger et qui me faisaient peur bien souvent. Là dessus venait se tisser une relation avec ma propre mère totalement destructrice et étouffante. Je ne voulais pas d'enfant, JAMAIS! Aucune envie de reproduire le schéma de ma mère, et ne jamais faire souffrir un enfant comme moi j'avais pu souffrir.
Lorsque je me suis dit que j'étais peut être enceinte, je me suis mise en colère après moi. Comment cela pouvait-il m'arriver, malgré mes précautions, malgré tout... Comment ne pas m'en être rendu compte? Cela était impensable de donner naissance à un enfant! Nous étions à l'époque en situation plus que précaire tous les deux, nous ne voulions d'enfant ni l'un ni l'autre... Et comment allait-il réagir? Cris , coups? J'ai eu peur, j'étais terrifiée... Je me suis dit que j'allais trouvé, demain... Et là un autre mécanisme s'est mis en place: la dénégation d'enfant. Ce sentiment qui fait que vous êtes persuadée que jamais vous n'accoucherez... Moi je l'ai cru. Malgré mes quatre brillantes années de psycho, moi j'ai cru qu'il ou elle allait rester à jamais en moi. Les mouvements ont disparu, comme si j'étais vide, sans rien...
Et puis le 5 août 2003 à 6h30, j'ai perdu les eaux... La réalité était là... C'est extrêment étrange quand j'y repense, il y a un an en arrière, j'aurai dit horrible, terrifiant, mais je me suis levée. Je me suis habillée et suis allée en voiture aux urgences de l'hopital à 15 kms de chez moi. Je me suis présentée et leur ai annoncé que j'allais accouché. Leur surprise lorsqu'ils m'ont vu débarquer seule et sans affaires. Ils m'ont emmené en salle de travail, et m'ont installée. Je leur ai annoncé détachée que je voulais accoucher sous X. Je n'ai même pas réalisé sur le moment ce que je disais. J'ai senti mon corps se tordre, et vous le dire met encore très difficile, mais ... Je leur ai demandé d'éteindre le moniteur, je ne voulais pas entendre son coeur, je ne voulais pas le voir... Pas parce que je ne l'aimais pas... Non tout simplement car je devais le laisser vivre une vie bien plus heureuse sans moi, sans toutes ces tensions, sans toute cette haine qui m'entourait à l'époque.
Une psy est venue me voir, pendant le travail, me demandant si j'avais bien réfléchi et si j'étais sûre de moi. Je lui ai expliqué que je ne voulais pas qu'il soit malheureux, qu'il ne devait manquer de rien, que je ne saurai pas l'aimer et que je préférai le savoir heureux dans une famille en mal d'enfant qui l'aimerait certainement mieux que moi. Son père? Mélange d'histoire, mélange de tout! Je lui ai dit qu'il était décédé. Mais c'est faux! Je n'ai compris qu'avec ma thérapie pourquoi je lui ai dit çà. Quelques années auparavant, l'homme que je considérai comme l'homme de ma vie s'est tué en voiture... Je voulais inconsciemment apparemment, que ce soit lui le père... Et çà me permettait d'accepter mon choix...
J'ai accouché à 13h45. Je ne l'ai pas vu, pas touché, pas entendu, à part dans le couloir quand ils l'ont emmené... à ma demande... Je ne voulais pas de souvenir. Peur de le toucher et de ne plus pouvoir m'en séparer. Je ne voulais rien savoir de lui pour mieux faire mon deuil, pour moins souffrir. La psy a compris et a respecté mon choix. J'ai ensuite été mise sous calmant, puis isolée des autres mères. Sur ma porte de chambre, il y avait un sens interdit avec "ne pas entrer". Je crois que je m'en souviendrai toute ma vie!
Le lendemain à 10h je signai une décharge pour sortir. J'embauchai à 13h30. Commença alors le deuxième supplice: le déni d'enfant! J'ai fait socialement comme si il ne s'était rien passé. Pas de psy, pas de suivi, surtout pas parlé! Personne ne le saura jamais. Seule moi sait qu'un petit être, un petit bout de nous, est quelque part choyer et aimer. Et cela seul me tenait. Et puis un an et demi plus tard, toujours avec le père de l'enfant, avec des relations plus tendues et de plus en plus violentes psychologiquement et physiquement, il m'a fait avouer une nuit son intuition. En tentant de m'étrangler, je lui ai avoué en larmes que oui, j'avais été enceinte, oui j'avais accouché, oui j'avais abandonné... Cela faisait presque deux ans que mon entourage me voyait être l'ombre de moi même, sans rire, sans joie. J'avais laissé une partie de moi dans cette salle. Je me sentais sale, monstrueuse!
C'est enchainé toute la descente aux enfers. Avec le père qui alternait entre compréhension et violence, l'annonce à mes parents forcée ainsi qu'à mon meilleur ami. Et le rendez-vous à la DDASS. Où j'ai appris presque deux ans plus tard que c'était une petite fille! Elle prenait vie pour la première fois! Elle était épanouie, heureuse, dans une famille avec déjà deux enfants... Je n'en saurai pas plus, mais le principal est là pour moi... La suite est d'autant plus glauque...
Nous nous sommes séparés, il m'a fait vivre un enfer jusqu'au mois de mai 2008. Maintenant on arrive à se parler, à en parler... Mais j'ai vécu trois ans de recluse, de honte, de regards moralisateurs, accusateurs de la part de mon entourage, qui n'a pas compris et qui surtout n'a pas voulu comprendre après. Je suis un monstre à leurs yeux point! Je l'ai cru pendant longtempts, et il m'arrive encore de le croire et de le sentir de temps en temps.
Ce soir, en regardant cette émission, je me suis retrouvée quelque fois dans certaines phrases, dans certaines situations. Et j'ai eu envie de le dire à qui le lira. Pas d'exhibition, juste expliqué une histoire, tout simplement. Vous savez, je suis tombée il y a quelques temps sur un blog où il était écrit que c'était inhumain d'abandonner ses enfants, que cela devrait être puni très durement par la loi, et que certains se battent pour en avoir, alors que d'autres les jettent par la fenêtre... Je prends le risque de recevoir ce genre de com ce soir, tout simplement, car aujourd'hui cela fait partie de ma vie. Elle est ma vie, ma cicatrice, chaque jour qui passe j'y pense, et encore plus à son anniversaire et aux périodes de Noël. Je comprends ces parents en mal d'enfant, mais franchement je sais qu'à l'instant T j'ai fait le meilleur choix pour elle. Oui pour elle! Moi je me reconstruirai jamais en tant que mère, je ne le veux pas, je ne veux pas d'enfant, je ne suis pas faite pour çà, c'est mon avis depuis que j'ai douze ans, c'est comme çà. Je n'ai pas d'instinct ou d'envie, je ne sais pas pourquoi, enfin un peu seulement... mais je l'accepte, mais tous les jours j'ai cette douleur en moi.
La chance que j'ai, c'est d'avoir rencontré un homme à qui j'en ai parlé dès le début de notre relation, et qui n'a pas jugé. Il a essayé de comprendre et a accepté tout simplement, accepté de rester avec moi malgré çà, tout en sachant. Et cela me rend forte, à chaque fois qu'il me regarde, à chaque fois qu'il me dit qu'il m'aime, je sais que c'est pour moi, et pas pour une personne factice, ou morcelée. Je ne vous dis pas que ma vie est facile tous les jours. Il y a beaucoup de nuit comme celle qui s'installe aujourd'hui où je pleure, où je me demande si j'ai fait le bon choix, où je me demande si un jour elle me pardonnera... la seule chose que je fais c'est lui écrire régulièrement pour que ce soit dans son dossier, pour qu'elle connaisse son histoire, et qu'elle sache que malgré tout c'était un geste d'amour...
Alors le reste du temps, je mets mes masques, drôles, libertins, consensuels... mais au fond de moi, au fond de ma personnalité complexe, la vérité est ici....
Je m'excuse par avance si il y a des coquilles mais pour une fois, je ne vais pas me relire, sinon jamais je le posterai!
Je me suis enfin décidée... Enfin je prends le courage de me livrer telle que je suis au fond... Me livrer en pâtures certainement mais tant pis... C'est aussi pour cela que j'ai fait ce blog, pour en parler, pour me confronter à certaines opinions, regards... Je dois le faire... Honnêtement et totalement!
C'est vrai qu'aujourd'hui je respire encore, qu'aujourd'hui j'essaie d'apprendre à aimer un homme qui cherche à me comprendre, qui cherche à ce que j'en parle... Ma thérapie m'a fait avancer pour m'ouvrir à lui, et accepter de continuer, même si c'est un combat contre moi-même chaque jour qui passe...
J'ai mis deux ans à le cacher à mon entourage...J'ai mis deux ans à réaliser mon geste... Deux ans à supporter les coups sans raison apparentes, sauf qu'au fond de moi je les excusais pas mon geste... Et puis après mon aveu, j'ai compris la violence verbale et physique de mon entourage, de mon ex... Et je me suis emmurée dans cette acceptation nauséabonde.
Si vous me croisez, vous trouverez que je suis normale, comme tout le monde, assumant ma vie, mais si vous saviez au fond de moi les fantômes qui me hantent, les monstres qui m'assaillent, vous ne verriez pas mon assurance de la même façon... Je ne suis véritablement moi qu'une fois la porte close, qu'une fois le silence installé... Et c'est pour cela que je veux vous livrer ma vérité ce soir... Pour que vous sachiez qui je suis... Pour que plus jamais les non-dits ne détruisent ma vie...
Le texte qui suit est brut, sans retouche ; il n'explique pas le pourquoi ; il n'est pas complet ; ne contient pas les tenants et les aboutissants mais donne un élément de réponse, l'élément de réponse qui fait qu'à ce jour je suis celle que je suis....
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5 Août 2003 … Tout commence ou tout finit ce jour-là ; tout dépend où l’on se place ! Date marquée à vie au creux de mes entrailles, en mon cœur, en mon corps… COUPABLE !!!! Coupable de silence ; coupable de traîtrise ; coupable de mensonge ; coupable… d’ABANDON !!!
Toute ma vie se résume par cette peur … mal-aimée ; abandonnée ; incomprise ; enfermée dans les méandres de mes pensées angoissantes – angoissées… et la petitesse de mon vécu ; de la petitesse de mon intelligence, j’ai commis le crime ultime… Triple Homicide… Le Père, La Mère, L’Enfant … et je suis en liberté ?... Comment ? … Pourquoi ?
« Tu es intelligente Stef, t'as une maîtrise de psycho, tu as fait des études » … tu parles ! Tais toi, voix sordide et enjôleuse ; intelligente de quoi ? D’avoir arraché ma fille de ses racines ; d’avoir soustrait sa chair à cet homme que j’aime tant ?... J’aime Tant… Temps présent… pour çà oui c’est mon présent, encore et toujours et pourtant… Passé, simple, composé, … compliqué bien que plus-que-parfait !
Comment ai-je pu être aussi sordide ? Aussi froide ? Je ne me reconnais pas… Était – ce réellement moi ? … Pourtant c’est moi seule qui suis allée, SEULE, accouchée de cet être sublime ! Comment avoir pu imaginer qu’elle resterait à jamais ancrée en moi ; qu’elle grandirait en moi ? … Intelligente ? Certainement pas !!! Je suis devenue tout ce que je hais, tout ce qui me répugne !!! Mère incompétente ! Mère Immorale ! Mère Indigne ! Mère Tueuse d’enfant ! Mère Tueuse de Rêve ! Mère…
Mais qu’est ce qui m’autorise aujourd’hui à utiliser ce mot ? De quel droit puis-je me qualifier de telle ? Je n’en suis pas une… Je ne le serai JAMAIS d’ailleurs ! Si j’avais été une mère, une vraie, je l’aurai écouté, ce cœur battre, alitée, perdue, pleurant, suffocante…
Oui, je n’aurai pas… non jamais accepté que quelqu’un coupe le son de ce petit cœur dans la machine… Je n’ai pas voulu l’entendre, tout comme je n’ai pas voulu la voir ou la toucher… çà m’en rend encore plus malade aujourd’hui… Peur de quoi ? Peur de lire dans son regard toute ma monstruosité ? … Monstruosité que je perçois dès que son père pose les yeux sur moi… Peur qu’elle me dise « me jette pas » ou pire « merci »…
Comment ai-je pu croire que je la sauverai de moi ? Je me suis trompée, tellement trompée… Si effrayée de lui ressembler à elle qui m'a fait tant de mal ; manipulatrice, étouffante, que c’est exactement ce que j’ai fait !!! Je suis pire qu’elle !! Pire que la reine des Chiennes… Elles, elles n’abandonnent pas… moi si !!!
« Quelle force, quel courage… » Certains diront… Tu parles !!! Quelle horreur ; quelle douleur… quotidiennes, éternelles. Chaque rire d’enfants, chaque pleur, chaque regard, me renvoient un peu plus à ma médiocrité, ma perfidie ! Je ne supporte ni les mères abusives, ni les mères violentes, ni les mères distantes, ni les mères incompétentes, ni les mères manipulatrices, ni les castratrices, ni les infanticides, ni les lâches, ni les démissionnaires, et pourtant… je suis toutes celles-là réunies !!! BRAVO !!! MAGNIFIQUE !!! Acclamation de l’arène de ma vie : lui, elle, mes amis, mes proches … tous trahis, tous bafoués, tous trompés par MOI ! Joli constat ; bel effort ; magnifique parcours !!!
Déserteuse ! Sale déserteuse… voilà ce que je suis. J’ai fui mon seul combat ; le mien, le vrai, le réel, le plus beau, le seul que j’avais à mener… Lâche !! Pauvre larve… J’ai eu l’occasion d’être papillon et je suis restée chenille… urticairisant tous ceux qui m’entourent. Une chance, une seule… et je l’ai gâchée !! Putain mais merde !!! POURQUOI ????
Tout m’assaille, me torture… ce n’est pas MOI putain ! Comment j’ai pu croire que j’avais raison ? Pourquoi ? Tout ce que je voulais c’était le rendre heureux et fier de moi !! Je l’ai sentie en moi sur les derniers temps, les tous derniers moments, derniers jours, dernières minutes, dernières secondes… je l’ai sentie se débattre et j’ai cru que c’était pour me fuir… et si c’était simplement pour se blottir ? Si c’était simplement pour nous apaiser ?... Nous aimer simplement, humainement… même çà j’en suis incapable !
Si je savais aimer je n’aurai jamais fait toutes ces erreurs ; je n’aurai jamais trucidé les gens auxquels je tiens le plus au fond… Tous ont goûté à ma perfidie ; tous ont été déçus par moi… Ma plus belle victoire ? Il faut croire que c’est décevoir, je fais tout pour en tout cas !!!
Cet acte si unique, si merveilleux, si humain, j’en ai fait un acte barbare, un acte mortuaire… Plus de trois ans que cela hante mes pensées, mes nuits ; chaque minute dans le silence ; chaque minute, chaque seconde je pense à elle et à tout ce gâchis, et je le revis inlassablement… Toujours cette même salle, ces mêmes personnes, ces mêmes larmes… Pourquoi je n’ai pas voulu l’entendre ? Pourquoi je n’ai pas voulu l’écouter ? Cette voix… Ces cris… Arrachés… Torture mentale, torture à vie… Toute ma sale vie je les verrai l’emmener, refermer cette porte, traverser le couloir… Toute ma vie, je sentirai ces deux paires d’yeux sur moi, fuyants, jugeant ; ma tête se tourner, embuée, absente, écartelée… mes larmes roulées, cette sensation de honte, cette certitude de mort…
Plus Jamais !!! Plus JAMAIS je ne connaîtrai ce que sera cet être de douceur et d’amour ! JAMAIS !!! Plus jamais je ne verrai son regard ! J’ai eu tellement peur de savoir que je n’ai su que deux ans plus tard que j’avais donné naissance à une petite fille… une FILLE !
La boucle est bouclée ! En voulant mieux faire, j’ai fait pire… Carnage mental ! Carnage vital ! Carnage affectif !... Il y a toutes sortes de femmes sur terre ; j’appartiens à la pire des castes… J’ai abandonnée ma fille ! Je l’ai laissée tomber ! J’ai plombé ses ailes, comme celles de son père… Beaux Anges Sauvages… Trucidés, violentés, malmenés, condamnés !!! Par quoi ? Par mon pseudo Amour !!!
Quel constat ! Plus j’aime et plus je fais souffrir… Et qu’est ce que j’en fais ? Bilan nauséabond… Honteuse, absolument honteuse, consciente du mal que je procure aux gens. Et je continue à m’autoriser à respirer ????? Pour quoi ? Pourquoi ? Dans quel but ? Qui sera ma prochaine victime ?????
J’ai prouvé que je n’étais digne de rien, de personne ; j’ai prouvé que je ne valais rien, rien du tout… Le seul sel que je pouvais apporter dans la vie, je l’ai jeté… oui JETE !! Comment définir autrement mon acte ? Je me répète sans cesse que c’est un acte d’amour, de sauvetage, que je ne voulais pas la faire souffrir, que je ne voulais pas qu'elle soit malheureuse, que je voulais qu'elle soit aimée, choyée, adorée, adulée, qu'elle ne manque de rien... mais je n’ai sauvé personne, absolument PERSONNE !!! Au contraire… J’ai fait couler le navire. Elle, partie à la dérive et disparue ; Moi, entre deux eaux, hésitante entre me battre et me laisser couler … si seulement… Les eaux mortes ne veulent pas de moi, me forcent à faire la planche… et Lui, heureusement, qui se bat… il a lâché ma main, il va être sauvé… Il a bien fait !!
J’ai jamais voulu l’entraîner dans le fond, j’ai toujours voulu qu’il soit libre, essence même de son être… mauvaise lecture, je me suis trompée de Liberté ! Je voulais qu’il ne soit jamais aliéné, assiégé, attaché … je sais qu’il en serait mort ! Et c’est pourtant exactement ce que j’ai fait… je l’ai aliéné à ma traîtrise, je l’ai enchaîné à ma folie !!!
Pourtant je donnerai ma vie, mes tripes pour lui ; et je ne lui ai pas donné sa fille !! Anormalité, aliénation mentale… comment peut-on me qualifier ? Déjà, peut-on me qualifier ? Que suis-je ? À part cette chose informe et purulente ? LIMACE !!!! Lente, gluante et vomitive….
Et aujourd’hui je m’étonne ? Mais m’étonner de quoi d’abord ? De ce téléphone que je guette et qui ne sonne pas ? Que j’en arrive à m’appeler moi-même pour vérifier qu’il fonctionne bien ? Quel morbide passe-temps !!! Qui pourrait avoir envie de se soucier de quelqu’un comme moi ? Qui pourrait apprécier ma présence en sachant la réalité de ma vie ? J’ai la réponse… PERSONNE !!! Je ne sais même pas si je le permettrai en fait… je ne suis même pas sûre d’avoir envie de sortir de ma torpeur, de mon horreur… Par peur de déculpabiliser ? Peut-être ! Certainement même… J’ai sans doute l’impression que continuer d’avancer me rendrait encore plus monstrueuse… certainement que j’y pense… certainement que j’en suis convaincue…
Me retrouver ? Pour quoi faire ? C’est vrai après tout… Je passe mes journées enfermée dans ma solitude, mes souvenirs et mes regrets, rien ne m’en fait sortir… J’attends qu’on me fasse un signe, mais moi je n’en fais aucun… Tétanisée !!! Peur d’être jugée, peur d’ennuyer, peur de prendre du plaisir, de me rendre compte que je ne suis pas tout à fait morte… et pourtant….
Je ne veux pas avancer, impression de la trahir, de LES trahir encore une fois… une fois de trop ! Si je tournais la page pour continuer le livre, qu’est ce qui me prouve que ce n’est pas la jaquette que je me prendrai en pleine gueule ??? Je me sens inappropriée, inutile, insipide… Le fait d’avoir entendu durant des années qu’il fallait se taire pour ne pas faire souffrir ; que je n’étais pas à la hauteur ; que je serai comme Elle, cette mère, du début à la fin, voici le résultat : CONDITIONNEE A TUER !!!
Pas besoin d’aller en Afghanistan, venez me voir ; observez moi et vous verrez tout ce que la misère intellectuelle peut engendrer !!! Misère Intellectuelle !!! Mais je suis même en deçà de çà !! Bien plus bas encore… ce terme est encore trop gentil à mon égard !
Je suis inqualifiable !!!!!! POINT.
Pendant l’affaire COURJAULT, je l’ai trouvée détachée, insensible… « Comment peut – on faire çà ? » Accouchée seule ! Tuer ses enfants de ses propres mains ? De quel droit ? …PUTAIN mais de quel droit, MOI, je peux me permettre ce genre de jugement, de pensées, de discours, de questions… « Pas pareil ? » Tu parles !!! « Toi tu ne l’as pas tuée »… Non c’est vrai, pas physiquement… mais psychologiquement ? …Hein ? Tu réponds quoi à çà ? Et son Père ? J’en ai fait quoi ? Hein ? Réponds moi putain, puisque je ne suis pas pareil…. Tu dis plus rien ? Tu sais que j’ai raison… J’ai fait pareil, j’ai sacrifié… J’ai tout sacrifié… Au nom de quoi ? … De rien… J’en sais rien… Quelle raison raisonnable peut-il y avoir pour cet acte ? JE SAIS !!!.... Aucun !
Emmenée, enfermée, cloisonnée dans ma tête, rien ne sort, rien ne transparaît, rien ne respire… Apnée perpétuelle, étouffée… par la crainte qu’il parte ? Qu’il hurle ? Que je lui fasse mal ? Que je ne ressente pas ce putain d’instinct maternel ???
Pourquoi je ne l’ai pas cet instinct ? POURQUOI ???? Pourquoi je ne l’ai pas eu ? Pourquoi ce putain d’instinct n’a pas été là ? Il aurait dû être là !!!! Il aurait dû putain… Et rien, nada, vide, pathétique… je ne suis pas comme ELLES !!!
Pourquoi j’ai les entrailles qui me rongent ? Pourquoi je me sens si sèche, si vide, si… RIEN ! Ni une mère, ni une femme… Humaine ? Encore moins ! Nulle part à ma place ; déjà il faudrait que j’en ai une ! Pas même dans une foire, pas assez attractive …!!!
Ce qui me fait le plus mal, à part le fait d’avoir tout gâché, tout détruit, tout atomisé… ? Il y a autre chose, vous étonnez-vous ? Oui, il y a PIRE pour moi depuis quelques temps… Ne pas les envier ! Ne pas envier ces mères ! Ne pas les envier de les voir avec leurs petits ! Çà c’est pire que tout pour moi en ce moment… Grosse interrogation… Suis-je encore plus monstrueuse que ce que j’avais imaginé ? Je pensais avoir touché l’intolérable mais non… Il est là l’intolérable !!! C’est tout aussi monstrueux que mon acte barbare. J’aimerai tellement les envier… Mais je ne la ressens pas cette jalousie, cette envie… Je me compare à COURJAULT et je suis incapable de m’imaginer comme ces mères aimantes et douces, protectrices et aimantes. Ma gêne ? Elle est due à mon acte, à ce que j’ai fait ou plutôt ce que je n’ai pas fait comparé à ELLES… Je me dis qu’alors cet instinct, cette envie serait là… mais n’est-ce-pas juste pour me rassurer ? Pour me donner bonne conscience ? Et ne pas couler ? … Je n’en sais rien… Je me pose la question…
On a tous nos cicatrices ; moi j’ai une plaie béante et aucun pansement n’arrive à la cicatriser. A VIE ! Je crois qu’en même temps je l’espère… Une façon de la garder en moi, avec moi… toujours ; ne pas la trahir une seconde fois, je ne le supporterai pas !
Et le laisser partir… Le laisser reprendre sa route, remonter sur une chaloupe et continuer… Je l’ai trop stoppé, trop accaparé, trop déçu, trop étouffé… Je sais qu’une partie de moi s’arrache, mais cela fait trop longtemps que je l’octroie, que je l’asphyxie. Le plus dur ? Pas qu’il parte… Non… Juste l’idée qu’elle, son nouvel amour, prend ma place à table, qu’elle prend ma place auprès de ses amis, qu’elle prend ma place dans ses pensées… Mais surtout qu’elle prenne la seule place que j’aurai pu avoir si … : FEMME – MERE !! La seule place que j’aurai dû m’autoriser à prendre !! J’ai opté pour la maison de la traîtrise !
Pars mon bel amour ; pars vite… Échappe toi de moi… Écarte toi de mes lanières… Ne te retourne jamais sur moi ; ne te retourne pas s’il te plaît… Jamais ! Enlève cette culpabilité de ton cœur ; tu n’es en rien coupable de mes erreurs. Mon seul souhait : qu’un jour vous vous retrouviez, toi et ta fille… un jour réunis, sans moi, sans ma honte, sans ma perfidie.
Vous êtes les deux plus belles, les deux seules choses de bien qui auront fait ma vie… Je suis si désolée… Peut-être un jour j’arriverai à comprendre… et à vous expliquer, vous déculpabiliser… Vous apporter les réponses dont vous aurez besoin…
Je sais que vous ne me pardonnerez jamais… moi non plus d’ailleurs…
Stef
09/04/07